Michel R. Campbell Ph.D.

Membre de l’Ordre des psychologues du Québec

L'obscénité

Cet article se veut une réflexion sur un concept sexopsychologique. Il n'est pas toujours évident de savoir ce que les représentants de la loi considèrent comme obscène ou indécent. Selon le dictionnaire Larousse, le terme obscénité veut dire: " Qui blesse ouvertement la pudeur par des représentations d'ordre sexuel. " Il peut donc s'agir de paroles, d'écrits, de photos, de graffitis, de gestes ou de comportements obscènes ou indécents. Le mot " blesser " implique une souffrance morale et une atteinte à la dignité d'une personne. Ce genre de blessure psychologique est évidemment punissable par la loi.

Le code criminel

Le paragraphe (8) de l'article 163 du Code criminel définit l'obscénité comme suit : "... est réputée obscène toute publication dont une caractéristique est l'exploitation indue des choses sexuelles; ou des choses sexuelles et de l'un ou de plusieurs des sujets suivants, savoir: le crime, l'horreur, la cruauté et la violence." Les tribunaux se sont longtemps questionnés, semble-t-il, pour savoir quelle était la norme applicable en matière d'obscénité et d'indécence, c'est-à-dire à quel moment quelque chose devient obscène ou indécent.

L'exploitation indue

Pour l'Honorable juge Dickson, de la Cour suprême du Canada, l'exploitation des choses sexuelles peut être indue de deux façons : elle peut être indue si elle dépasse les normes de tolérance de la société canadienne ou si elle est nocive pour l'ensemble de la société. Comment un juge peut-il savoir ce qui outrepasse la barrière psychologique des membres d'une société ? L'un des critères applicables selon la loi consisterait à savoir si on a outrepassé les normes de tolérance admises dans la société canadienne contemporaine. Il appartiendrait à la Cour de décider ce qui est tolérable ou intolérable suivant les normes de la société canadienne contemporaine, c'est-à-dire en considérant l'évolution sexopsychologique de la société. Le problème c'est que la norme de tolérance en ce qui a trait à la sexualité au Québec est différente de celle à Terre-Neuve ou ailleurs au Canada. À ce sujet, au Québec, sommes-nous une société distincte ? Doit-on suivre le courant Canadien ?

La norme

Il n'est pas évident de déterminer une norme morale en matière de sexualité. Selon le juge Dickson, la norme de tolérance ne serait pas déterminée par ce que les Canadiens estiment convenable pour eux-mêmes de voir, mais ce qui importe, c'est que les Canadiens ne souffriraient pas que d'autres canadiens voient parce que ce serait outrepasser la norme contemporaine de tolérance au Canada que de permettre qu'ils le voient.

En résumé, j'ai l'impression qu'il faut comprendre que ce qui est indu, c'est ce qui dépasse le seuil de tolérance de la communauté canadienne. De plus, si on souffre à l'idée de savoir qu'une personne voie (ou entend, touche, etc.) quelque chose de sexuel, c'est un signe que cela outrepasse le seuil de tolérance de la société. Évidemment, c'est seulement le juge qui entend la cause qui peut déterminer quel est le standard qui prévaut dans la société. Pas facile d'être juge ! Toutefois, il peut entendre des experts en statistiques, en psychologie et en sexologie, mais c'est lui ou elle qui décide des standards de la société contemporaine.

Il peut donc s'agir d'un juge conservateur ou pas, d'un homme ou d'une femme, d'un juge qui pratique une religion ou pas, d'un juge qui croit aux experts sondeurs ou pas, d'un juge avec des préjugés, ou encore, d'un juge bien informé. En matière d'obscénité, ce qui était illégal hier peut être légal aujourd'hui et illégal de nouveau demain. Tout dépend de quoi il s'agit (objets, écrits, films, spectacles érotiques, etc.).

Votre seuil de tolérance

Dans le domaine de la sexualité, il est parfois difficile de déterminer ce qui avantage ou désavantage l'évolution de l'espèce. La propagande haineuse et avilissante, qu'elle soit visuelle, auditive ou écrite, n'avantage certainement pas le mieux-être des humains. La violence sexuelle et l'exploitation sexuelle des enfants ne militent certainement pas en faveur du mieux-être. Mais au fait, où se situe votre seuil de tolérance concernant la prostitution, la pornographie et les spectacles érotiques ?

Préparé par le Dr Michel R. Campbell, psychologue et sexologue

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